Marie Bodiguian :

Jean-Philippe, bonjour. Je suis ravie. Merci beaucoup d’être là pour la Télé des Entrepreneurs.

Jean-Philippe Ackermann :

Bien, bonjour Marie, je suis très heureux aussi d’être là.

Marie Bodiguian :

Avant de parler de prise de parole en public, et en particulier aussi en visio. Je voudrais en fait, juste te faire un coup de chapeau parce que tu as vraiment un parcours atypique. Tu es conférencier et tes conférences sont déjà suivies par plus de 100 000 personnes. Tu es spécialisé en optimisme managérial et tu viens de sortir un livre qui s’appelle : « Aussi fine soit la tranche, elle a toujours deux faces ! » et qui vient d’une maxime asiatique. Donc, c’est vraiment ta spécialité : l’optimisme. Tu as ce livre qui est, nous est présenté en réalité augmentée pour trouver des clés de réussite, des vidéos donc, on est vraiment dans la motivation complète. Et aussi, ce qui m’a beaucoup intéressé dans ton parcours, c’est que tu as, en fait tu sors de 35 ans d’expériences de chef d’entreprise. Donc ce n’est pas rien d’avoir aussi décidé de faire ce virage, peut être à 90 ou 100 ou 360 degrés, de te lancer aujourd’hui dans la conférence et tu as pour, avec d’autres amis pour aider, on va dire des indépendants, les entrepreneurs, après le confinement mis en place, une plateforme qui s’appelle Millésime.Best, de formation pour les aider à grandir, profiter de ces moments un petit peu d’incertitude pour peut être d’avoir de la résilience et puis aussi se faire connaître. Alors aujourd’hui, nous sommes concentrés et bien en fait sur ton expérience de prise de parole en public. Mais en fait, je pense que l’optimisme va venir y mettre son grain de sel malgré tout. Alors si tu avais, on va dire, un conseil, un conseil numéro un à donner pour réussir une prise de parole en public. Quel serait-il ?

Jean-Philippe Ackermann :

Alors le premier conseil pour parler en public : c’est de pas parler face au public, c’est de parler à un public. Ça veut dire de se dire que j’ai avec moi des personnes qui sont bienveillantes et qui ne vont pas me juger et qui vont et qui sont là pour m’écouter. La peur, la peur de la prise de parole en public, c’est parce que je parle face à quelqu’un. Donc le face en fait, c’est une relation antagoniste, chez des personnes qui sont un peu, entre guillemets, des adversaires. On va dire comme ça. Et moi, il faut que je me bagarre pour parler. Alors que si je mets du plaisir, si je dis que les personnes qui sont là pour m’écouter sont bienveillantes, elles sont là effectivement pour travailler avec moi, pour entendre quelque chose. Si cette notion de plaisir, je la mets au cœur de mon discours, ça va être tout de suite beaucoup, beaucoup, beaucoup plus facile.

Marie Bodiguian :

Donc ça veut.

Jean-Philippe Ackermann :

C’est la clé numéro 1. Pour moi, c’est le plaisir et de se dire quand je rentre sur scène, par exemple, bien sûr, comme tout le monde, j’ai le trac et je me dis mais là, on est en famille. Et à partir du moment où je me dis qu’on est en famille, tout va bien.

Marie Bodiguian :

D’accord donc, en fait, notre cerveau n’est pas en danger, on va dire, et au contraire, on est dans une générosité. Est-ce que la générosité, justement, du partage, tu le, tu, tu l’as dit en préparant cette interview : est quelque chose d’important, donc du coup, est-ce que ça veut dire que cette générosité nous fait oublier notre peur ?

Jean-Philippe Ackermann :

Oui, oui, le fait. En fait, la prise de parole en public, c’est s’oublier soi-même pour ne penser qu’au public. A partir du moment où je m’oublie, moi, je ne suis plus sur l’auto jugement. Je ne suis plus sur le fait est-ce que je vais me tromper. Ou est-ce que ça va bien passer ? Est-ce que les mots sont bien ? Non. Peu importe de ça. Je donne au public, je suis là pour le public et toute mon attention doit être au niveau du public. Comment il réagit ? Est-ce que je le vois participer, est-ce que je le vois se mettre en retrait ? Est-ce que mes mots impactent ou pas ? Et donc, après moi, je dois changer mon attitude. Je dois changer, peut être même mon, mes mots de façon à ce public, et je dois donner au public. C’est pas le public qui me donne. Je dois donner au public. Et plus je vais donner au public, plus le public, par contre, lui va me faire un retour hyper positif qui va faire en sorte que je vais être encore plus généreux. S’oublier, s’oublier, s’oublier, s’oublier. Prendre du plaisir et s’oublier.

Marie Bodiguian :

Donc, un partage, on va dire, je dirais presque de vibration.

Jean-Philippe Ackermann :

Oui, oui, oui, un partage de vibrations, tout à fait ça.

Marie Bodiguian :

Et d’énergie ?

Jean-Philippe Ackermann :

Pardon.

Marie Bodiguian :

Un partage d’énergie ?

Jean-Philippe Ackermann :

Un partage d’énergie, alors ça, c’est quand on a le public fasse à soi, ça c’est vraiment facile. Et après, peut être qu’on parlera d’un public que l’on ne voit pas quand on est en visioconférence. Ca c’est encore autre chose.

Marie Bodiguian :

Absolument, absolument. Donc là, on est, on est dans un public que l’on voit, en visu. Donc tu parles de générosité. Et pour autant, en préparant cette interview, tu me disais la générosité ne suffit pas parce que à force d’être dans la générosité, on peut être peut être trop long. Lasser ? Qu’est-ce, qu’est-ce pourquoi ça ne suffit pas cette générosité ?

Jean-Philippe Ackermann :

Déjà, la générosité, parfois on se laisse enflammer et un conférencier ou une conférence ça doit être un spectacle. Ca veut dire ça a un temps limite. Parfois, on me dit : est-ce que vous pouvez faire votre conférence en une demi heure. Très bien. Est-ce que vous pouvez la faire en trois quarts d’heure ? Très bien. Est-ce que vous pouvez la faire en une heure ? Très bien. C’est un temps limite. Et dans ce temps limite, il faut absolument que j’impacte les personnes. Les personnes sont là pour moi, mais aussi pour ce que je vais dire, donc j’ai le fond et la forme. Là, on ne parle pas de la forme pour l’instant, on parle que du fond. Et le fond doit vraiment être impactant et pour qu’il soit impactant, je ne dois pas me laisser entraîner par le public. Le public est simplement un réservoir d’énergie dans un cadre bien ficelé, dans un cadre bien travaillé avant.

Marie Bodiguian :

C’est à dire, en fait, quand tu parles de comment dire, de réservoir d’énergie bien ficelé, ça veut dire que l’on doit se contraindre à un certain nombre de, par rapport à des choses à ne pas dépasser ?

Jean-Philippe Ackermann :

Alors oui, je dois préparer une intervention. J’ai quelqu’un qui m’a dit Monsieur, vous avez une heure. Il a son timing, quoi. Et ça veut dire que moi je dois, pendant cette heure là, être impactant et ne pas dépasser ce cadre là, ce cadre horaire. Ce qui veut dire qu’en amont, il a fallu que je prépare tout. Il a fallu que mon intervention soit hyper calibrée. Quand je dis calibré, ça veut dire que, je sais quand est ce que je vais raconter mes histoires, je sais quand est ce que je vais mettre de l’émotion, je sais quand est ce que je vais mettre du rire, je sais quand est ce que je vais mettre du cerveau, de la tête ou du coeur.

Marie Bodiguian :

Les tripes ?

Jean-Philippe Ackermann :

Mes tripes, je sais tout ça. Mais à partir du moment où j’ai fait cette préparation en amont, et c’est comme un sportif. Plus je me suis entraîné, meilleur je suis le jour du match. Là, plus je me suis entraîné, meilleur je suis le jour de la conférence et c’est là que je peux oublier, m’oublier moi-même, et ne penser plus qu’au public et après de donner de l’énergie, peut être de changer deux ou trois mots, mais ne pas dépasser le cadre prescrit.

Marie Bodiguian :

D’accord, et alors donc, du coup, aujourd’hui, il y a deux écoles dans cette préparation de conférence. On a des personnes qui travaillent comme toi en improvisation. Et si je comprends bien, de l’improvisation préparée et entraînée. Et puis, il y a l’école, on va dire du par coeur. Quelle est ta position par rapport à ces deux écoles ?

Jean-Philippe Ackermann :

Moi, moi, je pense que le principal, c’est d’être bien. C’est d’être bien avec ce qu’on fait. Moi, le par coeur, je ne sais pas le faire. Je ne sais pas faire du par coeur parce que je veux absolument m’adapter au public. Moi, j’ai six conférences. Celle qui est la plus demandée, c’est celle sur l’optimisme : « pour rebondir, dopez votre optimisme », mais elle est hyper calibrée. Par contre, si j’ai des commerciaux, je sais parler commercial. Si j’ai des patrons, je sais parler patrons. Si j’ai de l’encadrement, je sais parler encadrement. Si j’ai une entreprise de cosmétiques, je sais parler cosmétique. C’est-à-dire je vais adapter mon message. Je vais adapter mes mots au public que j’ai en face de moi. Si j’apprends par cœur, je ne peux pas adapter. Je ne peux pas adapter, ça veut dire c’est quelque chose de standard qui peut être très joli, très bien fait. Et il y a de très, très, très grands conférenciers qui sont uniquement sur le par coeur, qui ont un succès fou, qui font plus de 100 conférences par an. Donc moi, je me dis, c’est être à l’aise avec ce qu’on fait. Moi, je ne suis pas à l’aise avec du par coeur, je suis à l’aise avec, comme tu l’as dit, de l’impro préparée, en fait.

Marie Bodiguian :

D’accord. Mais c’est vrai qu’en fait, quand on n’apprend par coeur en même temps, quand on apprend par coeur, enfin moi je le vois dans mon expérience de comédienne. En même temps, quand on apprend par coeur, on peut arriver aussi à improviser parce qu’on maîtrise tellement bien son texte que en fait c’est fluide et on sent rend, on s’en rend plus compte qu’on apprend par cœur.

Jean-Philippe Ackermann :

Exactement, non non mais, alors on va être clair. Depuis le temps que je donne ma conférence.

Marie Bodiguian :

Tu finis par la savoir par coeur.

Jean-Philippe Ackermann :

Mais ce que je veux dire, c’est que je n’ai pas. Je n’ai pas fait comme, alors peut être qu’il faudrait que je le fasse un jour, je ne sais pas. Mais ou comme un acteur, les mots sont tellement ciselés, les phrases sont tellement ciselées, qu’elles sont magnifiques. Moi, c’est peut être moins ciselé. Tu vois ?

Marie Bodiguian :

En fait, tu, tu veux donner la fenêtre ouverte à la spontanéité ?

Jean-Philippe Ackermann :

C’est ça exactement, exactement. Je veux pouvoir réagir au public. Tu sais bon quand le public commence à regarder son portable, et bien il faut réagir. Quand le public se penche, et bien ça veut dire qu’il faut réagir aussi. C’est à dire, je veux pouvoir. Moi quand je suis sur scène, je ne dis pas que quelqu’un qui a appris par coeur n’est pas comme ça, attention.

Marie Bodiguian :

Bien sûr.

Jean-Philippe Ackermann :

Moi quand je suis sur scène, ce qui compte, c’est le public, moi je m’oublie et c’est le public qui compte le plus pour moi.

Marie Bodiguian :

Bien sûr. Alors on a parlé du fond. On a parlé du fond pour pouvoir justement se cadrer, pour dans une conférence se préparer, mais tu as évoqué la forme, c’est à dire donc quels sont, quels sont peut être des techniques peut être que l’on pourrait partager, quelques techniques à partager aujourd’hui avec nos entrepreneurs qui souhaiteraient se lancer dans la prise de parole en public pour pouvoir être performants, peut être éviter la peur. Enfin, il y a beaucoup de choses, quels ?

Jean-Philippe Ackermann :

Alors, je vais, je vais te donner trois techniques, mais je vais en donner une quatrième.

Marie Bodiguian :

D’accord.

Jean-Philippe Ackermann :

Et la quatrième, ça va être la première. Pour les chefs d’entreprise qui veulent parler en public : c’est de parler de leur légitimité. C’est qu’est-ce qui me permet, moi, de vous donner ce conseil. Est-ce que je vous raconte un livre ? Mais je ne suis pas légitime. Est-ce que je vous raconte une expérience ? Et là, je suis légitime. Ca veut dire que le chef d’entreprise, il doit trouver sa légitimité. Ce qui fait qu’on dit OK, monsieur le chef d’entreprise, je vous suis, je vous écoute, vous m’impacter parce que je sais que vous avez vécu ce que vous dites, vous l’avez fait et ok si vous l’avez fait, alors je comprends ce que vous voulez me dire. La première chose pour moi, c’est ça. Je vois des conférenciers qui racontent des livres, qui te disent : « moi, j’ai lu X centaines de livres, j’ai eu X dizaines de coachs, donc je vous parle de ça ». Non, non. Pour moi, la légitimité, c’est d’avoir vécu avant ce que l’on raconte. Et c’est ça qui est très important. C’est pour ça que, quand je parle du bonheur. Moi, j’ai pris la décision d’être heureux à 21 ans. Quand je parle de l’optimisme, j’ai pris cette décision là à 27 ans quand j’ai dirigé ma première société. Et donc je me sens légitime dans ce que je dis. Je pourrais citer de grands auteurs antiques et anciens. Je ne veux pas le faire parce que ça, ce n’est pas ma légitimité. Je crois que la force d’un chef d’entreprise, c’est sa légitimité.

Marie Bodiguian :

Excuse-moi de te couper. Ça veut dire que en fait la légitimité, elle, implique le fait d’incarner ?

Jean-Philippe Ackermann :

Oui, oui, le fait d’incarner. Le fait de soit je dis et bien moi, je suis un philosophe et je vous raconte ce qu’a dit Épictète, ce qu’a dit Aristote, etc. Soit, je suis un chef d’entreprise et là, on est sur la télé des chefs d’entreprise. Et là, par contre, je vous raconte ce que j’ai vécu. Je vous raconte ce que j’ai fait, je vous raconte ce que j’ai expérimenté, je vous raconte ce qui n’a pas marché, je vous raconte mes expériences. C’est ça la légitimité d’un chef d’entreprise quand il veut prendre la parole.

Marie Bodiguian :

Très bien, très bien. Donc, en fait, tu me disais la deuxième, une deuxième technique ?

Jean-Philippe Ackermann :

Alors après, après ce sont des clés. Moi, je m’appuie sur trois clés essentielles. La première clé : c’est la verticalité. La verticalité, tu la connais, toi tu fais du théâtre. Par exemple, là, je suis assis. Ça se voit pas. Je suis assis mais je suis hyper ver, verticalité. Je suis en hyper verticalité. Ça veut dire que j’ai le dos appuyé, les jambes bien pas pliées, etc. La verticalité, tu le sais, c’est la façon d’être ancrée au sol, avoir l’impression que notre tête est tirée pour pouvoir dégager la colonne d’air. Et pourquoi dégager la colonne d’air ? Parce que je vais pouvoir parler non pas en apnée, mais pouvoir respirer et surtout, surtout, mettre des silences. C’est ça qui est important. Et la verticalité, c’est vraiment une clé de démarrage, et une clé de posture aussi quand je prends un coup de trac. Je me remets en verticalité. Bien, alors c’est la première, le premier conseil. Pour moi, c’est un conseil très, très, très fort. Je démarre en verticalité. Je ne suis pas, je ne suis pas désorienté. Je suis par en déséquilibre. Le deuxième conseil que je peux donner, c’est ce qu’on appelle : le regard global porté. Ça veut dire qu’il faut que le, mon public ait l’impression que je le regarde. Il faut que si j’ai 100 personnes, 200 personnes, 300, 1000 personnes, 2000 personnes, moi ça m’est arrivé de parler devant 2500 personnes. Il faut que le public ait l’impression que chacun d’entre nous, nous sommes regardés. Et bien là, il y a des techniques. C’est le regard global porté en, bon ça, c’est un peu trop long, peut être, pour expliquer la technique. Mais pour moi, c’est important de travailler là dessus. Et la troisième clé, la troisième astuce : c’est le vouloir vocal. Et en fait, se vouloir vocal, c’est vouloir que chacun dans la salle m’entende. Et c’est lié au regard c’est-à-dire qu’on sait très bien que la voix, elle est portée par le regard. Et à partir du moment où je fais ce regard global porté. Global ça veut dire : regarder tout le monde. Bon, il y a des clés, il y a des astuces. Porté, ça veut dire que je vais bien regarder dans les yeux. Un coin de salle ou des personnes. Ma voix va être portée. Ce qui veut dire que si je regarde le premier rang, ma voix va partir sur le premier rang, et les derniers rangs vont plus m’écouter et c’est là qu’après, je vais avoir des personnes qui vont chuchoter, qui vont parler et qui vont se désintéresser de ce que je dis. Et donc, je dois pouvoir avoir ce regard sur le dernier rang pour que ma voix parte sur le dernier rang. Trois conseils.

Marie Bodiguian :

Magnifique.

Jean-Philippe Ackermann :

La verticalité, le regard global porté et le vouloir vocal.

Marie Bodiguian :

Magnifique. Merci beaucoup, Jean-Philippe. Vraiment, c’est en effet des techniques à travailler et c’est vrai qu’au théâtre, on travaille ces techniques là. On n’en parle pas de la même façon, mais de la projetée de la voix, l’articulation aussi est, et est très importante. De répéter avec un et s’entraîner avec un crayon dans la bouche, c’est aussi, ça fait partie des choses qu’on fait au théâtre, par exemple. Alors donc, du coup, alors je voudrais juste revenir sur, on va dire, cette incarnation du message. Est-ce que quelque part, à force de répéter et répéter pour préparer sa conférence, est-ce que finalement, on ne finit pas par devenir un peu dans le mécanisme ? Parce que justement, nous mêmes, au théâtre, tu vois, quand à force de savoir tellement le texte, on finit par être, parfois, on se dit ah non ce soir, j’ai été mécanique, tu vois ? Est-ce que ça, est-ce que, est-ce, et justement, bon après, c’est un petit peu aussi le problème des gens qui peuvent réciter. Mais, comment est-ce qu’on peut arriver à garder sa spontanéité ?

Jean-Philippe Ackermann :

Alors moi, j’ai une technique qui est : quand je monte sur scène, je me dis : « fais ton métier ». Voilà, c’est ma technique. Et fais ton métier, et pourquoi ? Parce que parfois, quand tu es conférencier, tu as des scènes extraordinaires, et là, avec un régisseur, avec de la lumière, avec un son fabuleux. Et là, tu prends excuse-moi l’expression, mais tu prends un pied pas possible. C’est absolument extraordinaire. Mais parfois, tu arrives aussi dans des endroits où alors tu vois c’est une salle de réunion d’hôtel. Il y a à peine le son qui est là, t’as des tous petits haut parleurs et je me dis : « fais ton métier ». Et fais ton métier, ça veut dire donne le meilleur de toi-même. Et ça veut dire quoi ? Ça veut dire que même si je raconte toujours la même histoire, je ne suis pas mécanique. Parce que faire mon métier, c’est faire en sorte que le public adhère à ce que je dis et de toujours m’oublier pour regarder le public et faire au mieux les choses, de façon à ce que le public à la fin, soit heureux. Donc, même si je raconte toujours la même chose, je ne suis jamais mécanique dans ce que je raconte parce que je ne vais pas avoir les silences au même endroit, je n’ai pas avoir parfois de l’émotion au même endroit. Je ne vais pas avoir le regard au même endroit parce que je vais toujours avoir ce public qui me, avec lequel j’interfère et qui va me permettre de faire mon métier du mieux possible. Moi voilà « fais ton métier ».

Marie Bodiguian :

Parce qu’en fait, au delà de la prise de parole en public, tous les chefs d’entreprise doivent, à un moment donné, pitcher, faire leur pitch et quelque part, aussi, on voit tellement de personnes qui font des pitchs où c’est mécanique, c’est récité.

Jean-Philippe Ackermann :

Oui.

Marie Bodiguian :

Et donc en fait, sur une petite, on va dire sur un petit timing parce qu’en fait, c’est vrai que quand on s’installe dans une conférence, on a son rythme, on a, mais sur une petite, une petite, un petit timing. Quels conseils tu pourrais donner justement à quelqu’un qui doit faire son pitch, l’incarner, ne pas être mécanique en reprenant peut être un peu les choses que tu as dit déjà ?

Jean-Philippe Ackermann :

En fait c’est s’amuser. C’est toujours pareil. Tu sais que l’elevator pitch, par exemple, c’est quelque chose qui est marrant à faire parce qu’en 30 secondes, je vais te dire ce que je fais, etc. Soit c’est toujours la peur que j’ai, la peur du jugement, la peur de me tromper, la peur du regard des autres et je vais devenir mécanique. Soit j’ai envie de m’amuser avec toi, Marie, quand je dis m’amuser tu vois ce que je veux dire, c’est-à-dire prendre du plaisir, tu vois, cette émission, moi je prends du plaisir d’être avec toi. Je calcule pas ce que je dis, ça, ça vient tout seul. Tu vois, c’est pas mécanique quoi. Je peux dire des bêtises, mais c’est au fond de mon cœur. Et soit c’est toujours, c’est toujours là cette relation à l’autre et au plaisir. Je crois que c’est important, le plaisir. Et le pitch, bien sûr, au début, il est travaillé, il est préparé. Ce mot là, est-ce que je le mets avant, je le mets après, etc. Mais à un moment donné, je dois m’amuser. Je dois prendre du plaisir. Et là, c’est plus mécanique et je vais le changer. Parce que quand je vais voir que la personne en face ne comprend pas tout à fait ce que je dis, et bien ce n’est pas grave, je vais changer plus tard. Et c’est ça que j’ai, c’est là que j’évite la mécanique, c’est là que j’évite d’être figé sur moi-même et au contraire je donne et je retombe la générosité.

Marie Bodiguian :

J’ai envie de dire en fait dans tout ce que tu dis presque tu, tu, ton leitmotive, c’est de parler de cœur à cœur.

Jean-Philippe Ackermann :

Oui, c’est important. Moi tu sais, j’ai très rapidement à l’âge de 21 ans, j’ai appris qu’on ne vivait qu’une fois, qu’une seule fois et donc parce qu’on vit qu’une fois, je me suis dit tiens j’ai envie d’avoir une mission et j’ai cherché une mission tu sais à la Nelson Mandela, enfin une mission élevée, etc. Mais j’ai compris qu’à mon niveau, ma mission, c’était simplement de faire autant que faire se peut faire plaisir aux autres et me faire plaisir. Et donc, depuis l’âge de 21 ans, et bien j’essaye de faire ça. J’essaye de faire plaisir aux autres, j’essaye que ce plaisir me revienne parce que la vie est miroir, etc. Donc le dialogue, ça fait partie de cette vie. Le dialogue, ça fait partie du fait qu’on ne vit qu’une fois et que je dois faire plaisir à l’autre, que je dois avoir autant que possible des mots bienveillants, des mots respectueux, des mots positifs, des mots optimistes, de façon à ce que l’autre en fasse se dise et bien j’ai quand même passé un bon moment avec cette personne là quoi, voilà.

Marie Bodiguian :

Et surtout, et surtout, je pense qu’on peut rajouter le fait que faire plaisir à l’autre, ça fait partie, on va dire, même des choses qui nous font plaisir à nous. C’est à dire qu’on se fait plaisir à faire plaisir et à partager, c’est ça qui est, et c’est quand même important, même au niveau du cerveau, c’est comme ça que ça fonctionne donc.

Jean-Philippe Ackermann :

Oui, en fait la vie est miroir. La vie est miroir, c’est à dire qu’en fait je reçois ce que je donne. La vie, c’est une auberge espagnole quoi. Si je ne donne rien, je recevrai rien. Si je donne de la critique, et bien je recevrai de la critique. Si je donne du négatif, je recevrai du négatif. Si je donne de la colère, je reçois de la colère. Mais si je donne du positif, je recevrai du positif. Si je donne de l’optimisme, je reçois de l’optimisme. Et dans mes conférences, je parle de ça comme thématique de management. Qu’est-ce que je donne à mes collaborateurs et de ce que je vais donner, ça va me revenir. Et forcément, si moi, je donne du positif, de l’optimiste, de l’enthousiaste, je vais avoir en face de moi des collaborateurs qui vont avoir envie de travailler, qui vont avoir envie de faire les choses, qui vont avoir envie de mener leur mission et forcément l’entreprise aura une meilleure performance. Donc tout ça, tout ça, tout ça est un tout et tout ça est lié. La façon de parler, la générosité, la mission que j’ai dans la vie. Et puis le regard que je porte aux autres parce que la vie est miroir.

Marie Bodiguian :

Absolument. Alors, venons en à la conférence, à la web conférence, c’est à dire à la prise de parole en public en visio. Aujourd’hui, avec le confinement, les nouvelles moeurs en fait qui sont en train de s’installer avec la crise sanitaire, on est de plus en plus de pris en prise de parole, en public, en visio. Et des chefs d’entreprises qui n’avaient peut être pris jamais la parole de visu, sont obligés aujourd’hui de picher en visio ou de peut être passés, comment dire, préparer une conférence, ne serait ce que via ta plateforme millésime.best. Quels sont les conseils que tu pourrais donner pour réussir une prise de parole en visio ? Je dirais une visio webconférence, une visioconférence.

Jean-Philippe Ackermann :

Alors, le premier conseil que je vais donner, c’est comment je me prépare. Comment j’ai mis mon ordinateur ? Comment, quel est le décor qui est derrière moi ? Comment je suis habillé ? Quelle est ma verticalité ? C’est comment je me prépare déjà. Il faut que je sois à l’aise. Il faut qu’autour de moi, mon environnement, il soit plutôt favorable, et qu’il m’inspire, que j’ai envie de donner quelque chose de sympathique. Ensuite, pour un conférencier comme moi, mon astuce c’est que je me dis que derrière, il y a 300 personnes, voilà. Donc je me dis que, donc je vois, je visualise une salle, un théâtre, je visualise 300 personnes. Et puis j’essaye de donner le maximum parce que si je me dis je ne vois pas le public, je l’entends pas. Je suis tout seul. Forcément, je vais être moins bon que si je visualise le fait que je ne suis pas seul, que je suis, que je suis sur une scène et puis derrière j’ai 300 personnes. Donc 1, la préparation physique c’est hyper important. Et deux : le mindset, se dire que derrière moi, il y a des gens qui m’écoutent quoi, et de les voir sourire. De les vois sourire, de les voir interagir, voilà même si personne, même si parfois, il peut y avoir personne quoi, c’est pas gênant.

Marie Bodiguian :

Alors après, se dire qu’on a 300 personnes, ça peut quand même pour certains. Toi, tu as l’habitude. Donc, en fait, se sont tes repères de te dire que tu peux avoir 300 personnes. Maintenant, un chef d’entreprise, un entrepreneur, se dire qu’il a 300 personnes derrière son oeilleton, ça peut quand même, mettre les jetons, pour rimer.

Jean-Philippe Ackermann :

Tu as raison. Tu as raison. Pour certains, ça peut faire peur. Alors si la personne, elle est à l’aise avec une personne, et bien qu’elle se dise qu’il y a qu’une personne. Si la personne, mais en fait, il faut quand même s’imaginer qu’il y a quelqu’un derrière quoi. C’est à dire que si je dis, si je m’imagine, si je m’imagine que je parle à une machine, je ne vais pas être bon quoi, il faut que je parle à des gens. Donc là et bien je sais que tous les deux, Marie, on est que tous les deux. Mais dans mon esprit, je me dis que puisque ça va passer sur LinkedIn , il va avoir beaucoup de monde derrière.

Marie Bodiguian :

Ben j’espère bien.

Jean-Philippe Ackermann :

Donc je parle comme si je parlais à beaucoup de monde.

Marie Bodiguian :

Bien sûr, bien sûr.

Jean-Philippe Ackermann :

Voilà, mais si je faisais une émission web pour mes collaborateurs, et bien si je pense que derrière, j’ai 10 collaborateurs et bien il faut que je vois ces 10 collaborateurs. Il faut que je visualise mon public en fait, c’est très, très important. Il faut que je fasse abstraction du lieu où je suis, de la machine, de l’ordinateur, de la caméra pour que je m’imagine le public.

Marie Bodiguian :

Quitte à mettre des photos en fait, moi, c’est ce que je dis à mes clients dans ma formation. Mettez des photos des personnes qui vous sont les plus proches, comme si vous leur parliez.

Jean-Philippe Ackermann :

Oui, oui. Mais au début, au début, c’est déstabilisant. Mon premier webinaire que j’ai fait, je t’avoue que je me suis dit mais à qui je parle. Et tout de suite, tout de suite. Et au début, je n’étais pas bon parce que je parlais à, je parlais à une machine, quoi, tu vois ? Et c’est tout de suite, je me suis mais attends mais parles à un public et dès que tu parles à un public, ça change tout.

Marie Bodiguian :

Alors du coup, ça, c’est la préparation et le mindset en fait, le mental. Maintenant, comment concrètement, on va dire techniquement, peut-on vraiment incarner dans la gestuelle face à un ordinateur ? Parce que tu vois, regarde, je suis là, on voit mes mains, mais il faut vraiment que je les lève. Quand on est de visu, je veux dire c’est tout le corps, l’incarnation d’un message, c’est tout le corps et le langage non verbal qui parle. Là, on a le visage et naturellement, qui parle. Mais on est quand même figé du reste du corps. Comment est-ce qu’on peut faire pour vraiment arriver à incarner un message face à un écran ?

Jean-Philippe Ackermann :

Alors bien sûr, c’est plus compliqué comme tu l’as, tu l’as dit, Marie, parce qu’on a pu, on a pu le corps. Tu vois, même mes mains tu ne les vois pas, etc pourtant, je bouge. Et en fait, je crois que il faut que ce vouloir vocal. Il faut que cette générosité soit encore plus forte. Parce que, justement, on ne voit que le visage. Il faut que ce visage, j’essaye autant que faire se peut qu’il soit expressif, qu’il soit souriant, qu’il soit… Que je donne quelque chose et que les personnes en face aient envie de m’écouter. Et on revient sur le parler avec le cœur. C’est beaucoup plus facile pour avoir, pour donner ce message que si je parle avec ma tête. Alors c’est sûr que si je dois donner des chiffres, c’est parfois plus compliqué que si je dois donner de la motivation. Mais oui, mais tu as raison, c’est plus dur à incarner quand on est derrière une caméra. Que quand on est est sur une scène. Je suis d’accord avec toi.

Marie Bodiguian :

Alors après, autre, on va dire, paramètre comment dire qui, peut être, comment dire qui peut bloquer en fait aussi un chef d’entreprise et on va essayer de dénouer un petit peu tous les problèmes aujourd’hui, si on peut. C’est que non seulement en fait quand tu fais une conférence, on va dire de visu, tu es face au public. Quand tu es là aujourd’hui, on est face à face ou si tu parles comme ça, tu es, tu sais qu’on te voit, toi, mais qu’en visioconférence, souvent, on se met des PowerPoint. Et là, du coup, on est dans une petite case et c’est une catastrophe. En fait.

Jean-Philippe Ackermann :

Oui, mais il faut s’habituer à ça, c’est à dire, tu vois, là aussi.

Marie Bodiguian :

Excuse-moi. Est-ce que le PowerPoint est vraiment indispensable ?

Jean-Philippe Ackermann :

Et bien tout dépend ce que j’ai à démontrer, et à montrer. Voilà. Moi je pense que de plus en plus, j’enlève les PowerPoint de plus en plus. Mais parfois, oui, c’est utile parce que et bien c’est, j’ai une démonstration à faire. C’est mieux s’il y a un dessin, c’est mieux s’il y a un schéma, c’est mieux s’il y a une citation. Si bien que le PowerPoint, c’est pas mal non plus. Mais je crois que de plus en plus, les gens ce qu’ils veulent entendre, c’est l’authenticité de quelque chose, de quelqu’un, son histoire, plus qu’une démonstration. Puis, ce que je dis aussi, ce qui est compliqué parfois, c’est de pas regarder la personne mais regarder l’œilleton. Tu vois là pour, là je te vois, je te regarde pas Marie mais je regarde la caméra. Et c’est vrai que sur, c’est un peu de la technique, mais sur un ordinateur, ça, ça peut paraître compliqué. Donc si je te regarde, ça fait ça. Si je te regarde, les gens se disent et bien tient non il ne me regarde pas, mais il est en train de regarder Marie, alors que si je regarde la caméra, je suis en train de te regarder.

Marie Bodiguian :

Alors que moi, je te regarde, moi je te regarde. Donc juste du coup, on sait que l’on est dans un tout petit carré quand on a un PowerPoint. Je dirais en fait, mon réflexe de comédienne serait de te dire et bien il faut peut être exagérer le trait, caricaturer, mais du coup, est-ce que ça peut pour des personnes qui n’ont pas l’habitude, faire quelque chose de surjouer. Comment on incarne dans un petit carré ?

Jean-Philippe Ackermann :

Je pense que quelqu’un qui n’a pas l’habitude, il vaut mieux qu’il reste lui même quoi. Ça me parait évident. C’est pas la peine qui surjoue. C’est pas la peine qui force le trait. Il vaut mieux qu’il reste lui même. Par contre, il faut absolument qu’il joue sur la voix. Il ne faut pas qu’il ait une voix monocorde parce que là, on va pas le perdre. Ca veut que s’il prend un coach comme toi ou comme d’autres, qu’il le fasse jouer la voix, l’intonation de la voix, la façon de parler, les silences, la respiration. Mais peut être pas jouer les mimiques, pas jouer la, parce que ça, c’est compliqué à faire. Et puis on sent quand c’est, quand c’est travailler, quand c’est jouer, quand c’est surjouer.

Marie Bodiguian :

Oui.

Jean-Philippe Ackermann :

Je pense qu’il vaut mieux qu’il travaille la voix, l’intonation, les hauts, les pleins, les déliés. Le travail sur les consonnes, le travail sur les voyelles, ça me paraît être plus, plus, plus fort.

Marie Bodiguian :

Moi, je rajouterais en fait une chose, c’est que dans la préparation, c’est vraiment se dire dans les tripes. Qu’est-ce que j’ai envie vraiment que les gens fassent après ? L’action que je voudrais vraiment, qu’est ce que je voudrais, tu me parlais de la mission tout à l’heure. Comment est-ce que j’ai envie d’aider les gens pour que véritablement je les aide à changer ? Et du coup, ça part des tripes. Et là, je pense qu’on peut mieux incarner même dans un petit, un petit carré.

Jean-Philippe Ackermann :

Mais là c’est revient à ce qu’on disait tout à l’heure, Marie. C’est à dire que je sois conférencier, ou que je fasse une réunion, tout part de ta légitimité, ta légitimité ce sont les tripes, justement. C’est ce que tu as vécu, ce que tu as fait, etc. Et quand tu es patron, moi j’ai dirigé des 350 salariés, des co-dir, j’en dirige encore maintenant, plus en tant que conseil. Il faut que la personne ressente que tu vibres et que tu vives ce que tu dis. Et effectivement, là où tu as raison, Marie, c’est qu’on peut très bien faire passer, dans une caméra, comme dans un écran. Cette façon, ses tripes. Mais parfois, quand tu vas parler de fonds de roulement ou de besoin de fonds de roulement, tu sais les tripes…

Marie Bodiguian :

Alors je te dirais oui et non. Parce qu’en fait, à partir du moment où on oriente le message vers les conséquences émotionnelles que ça peut avoir de ne pas avoir de fonds de roulement. Là tout à coup.

Jean-Philippe Ackermann :

Tu as raison, tu as raison.

Marie Bodiguian :

Il y a stress.

Jean-Philippe Ackermann :

Non, non tu as raison, c’est à dire que derrière, on revient alors là, on va faire un peu, peut être de management d’entreprise. On revient à la raison d’être de l’entreprise. On revient à son pourquoi, à son Why, comme on dit aujourd’hui. Et tu as raison, c’est que si je veux mener la mission d’entreprise, la raison d’être de l’entreprise, il vaut mieux que j’ai des fonds de roulement positifs et donc je peux définir tout ça. Effectivement, je peux sortir du chiffre pour rentrer effectivement dans la mission, effectivement.

Marie Bodiguian :

Ce que je voulais dire, en fait, c’est que, est-ce que, comment dire, même avec des chiffres et un ordinateur, est-ce que ton expérience t’a montré qu’on peut mettre quand même de l’émotionnel ?

Jean-Philippe Ackermann :

Oui, oui, oui, oui, oui. Alors l’émotionnel, c’est pas. L’émotion, il y a deux types d’émotions tu sais, c’est la dynamisante et la frustrante. L’émotion, ce n’est pas simplement, ce n’est pas toujours pleurer. Les gens confondent souvent ça.

Marie Bodiguian :

Ah non.

Jean-Philippe Ackermann :

Rire c’est une émotion aussi. Il y a s’amuser.

Marie Bodiguian :

Bien sûr.

Jean-Philippe Ackermann :

Et oui, et oui, on peut le faire. Oui, on peut le faire. On peut rendre les chiffres très agréables, on peut rendre la lecture d’un bilan très agréable. Du reste, je fais une petite parenthèse. Moi, j’ai une formation qui s’appelle, d’une journée, qui s’appelle la lecture stratégique d’un bilan où je démontre comment, avec un bilan, je peux diriger et mettre en stratégie une entreprise et on le fait sous forme vraiment de. On est décontracté, on est souriant et effectivement, ce chiffre, on peut s’amuser avec.

Marie Bodiguian :

Alors écoute Jean-Philippe, j’aimerais juste faire une dernière parenthèse et question concernant l’optimisme. Est-ce que tu pourrais, en fait, on va dire dans l’époque qui nous est, qui aujourd’hui que l’on vit qui est difficile. Quels seraient les conseils que tu pourrais donner un ou deux conseils vraiment, pour mettre en place cet optimisme ? Peut être de redéfinir pour toi, qu’est-ce que c’est que l’optimisme ?

Jean-Philippe Ackermann :

Alors ce qui est important c’est que l’optimisme ce n’est pas une valeur que l’on met en place quand tout va bien. Ca, c’est facile. N’importe qui peut être positif ou optimiste quand tout va bien. C’est une valeur comme le dit Baden-Powell, c’est une forme de courage être optimiste, qui donne confiance et qui mène au succès. Bien, ça veut dire quoi ? Ça veut dire que il y a une différence entre positif-négatif, optimisme-pessimisme. Je vais être un peu, un, un peu précis là-dessus parce que les gens confondent. Positif ou négatif, c’est une valeur d’interprétation de l’instant. Ça veut dire que par rapport au discours de nos élus, j’ai le droit de pas être content ou j’ai le droit d’être content, suivant la vision que j’ai des choses. Si je suis restaurateur, j’ai le droit de ne pas être content. Si je suis pas touché, j’ai le droit de dire c’est pas, c’est pas très grave. J’ai le droit. Ca c’est positif ou négatif. Pourtant, c’est toujours les mêmes, les mêmes, le même mot, les mêmes conditions, etc. Bien, et donc j’ai le droit, j’ai le droit d’être en colère. J’ai le droit d’avoir de la peine quand je perds quelqu’un. J’ai le droit d’être déçu quand professionnellement, ça ne marche pas, etc, j’ai le droit. L’optimisme et le pessimisme, c’est une vision d’avenir. C’est à dire comment je vois l’avenir. Et tu as compris que l’optimiste, c’est quelqu’un qui a confiance en l’avenir. Pour être simple, après la pluie, vient toujours le beau temps, toujours toujours toujours. Ca veut dire qu’après les problèmes viennent toujours les solutions. Et moi, quand j’écoute aujourd’hui ce qu’il se passe, je me dis quand même, je me dis quand même. OK, la situation est importante, mais j’ai quand même 99,99% des personnes qui ne sont pas touchées. J’ai quand même le taux de mortalité, il y a des morts, malheureusement, et je ne voudrais pas que ça soit dans ma famille mais il y a des faits. Ça veut dire que je dois relativiser aussi ce qu’il se passe et ce qu’il se dit. Et je dois me dire que ce moment difficile, il est fait pour se réinventer. Nous, on s’est réinventé dans notre entreprise. On est en train de. Le monde est en train de se réinventer. En fait, le Covid, c’est un accélérateur de tendances. Donc être optimiste aujourd’hui, c’est regarder toutes les opportunités que nous offre ce moment compliqué, ce moment difficile, ce moment où je ne suis pas en connexion avec les autres, ce moment où je suis obligé de porter le masque, ce moment où, pour certains, ils vont s’arrêter de travailler. Comment effectivement, je peux construire ma vie derrière ? C’est ça, l’optimiste. Si tu veux, pour être un peu léger. Je vais dire que le pessimiste, c’est quelqu’un qui ne sait pas ce qui va se passer, mais pense que ça va mal se passer. Qu’un optimiste ne sait pas ce qui va se passer, mais c’est que ça va bien se passer. Et ce que dit, cette légèreté, elle est très importante après dans la façon d’agir. C’est à dire que si je pense que ça va mal se passer, je vais agir en fonction de ça pour me donner raison et pour te dire, tu vois Marie, ça s’est mal passé, je te l’avais dit.

Marie Bodiguian :

C’est ce qu’on appelle le biais de confirmation.

Jean-Philippe Ackermann :

Exactement. Et l’inverse est aussi vrai. C’est à dire que si je pense que ça va bien se passer, je vais mettre en mouvement des actions pour que ça se passe bien, pour que je te dire, tu vois, Marie, je te l’avais dit, ça pouvait bien se passer. Je crois que aujourd’hui, on a une chance inouïe, si on regarde les solutions, si on regarde les opportunités, si on regarde le positif de ce qui se passe. Je ne nie pas le négatif. Je ne nie pas les problèmes. Je ne nie pas les menaces, même pour certains. Et je suis très, très, très, très, très moi inquiet, je peux le dire des drames humains, au delà du drame sanitaire. Et c’est pour ça que je milite pour que chacun d’entre nous, on soit beaucoup plus positif. On soit beaucoup plus optimiste parce que je pense que si tous les gens qui vont bien et je l’ai écrit ce matin à une amie. Si tous les gens qui vont bien sont positifs et optimistes, on va aider à se relever, les gens qui vont pas bien. On va aider à relever notre économie. Ce n’est pas en étant sur Facebook, en mettant des messages sur le complotisme, en mettant des messages négatifs, qu’on va aider nos restaurateurs, qu’on va aider les chefs d’entreprises qui ont des difficultés. Ce n’est pas du tout là comme ça, comme ça qu’on les aide parce que si je lance du négatif, je lance du stress aux autres et ça veut dire que moi, si je stresse, je ne vais pas voir les restaurateurs, je ne vais pas dans les entreprises, mais au contraire, il faut un mental très fort aujourd’hui pour relever la situation et l’optimisme, je suis un peu long excuse-moi, mais c’est mon coeur, ça. Et l’optimisme est une valeur vraiment de courage, une valeur. Tu sais, c’est Alain qui disait le pessimisme est d’humeur, l’optimisme d’une volonté. Il faut avoir cette volonté aujourd’hui de vivre, de redresser notre pays, de redresser nos entreprises et puis d’agir. Et puis d’arrêter de se lamenter sur les réseaux, sur les réseaux et arrêter de faire du yaka et du faucon, mais plutôt d’être en action.

Marie Bodiguian :

Donc, en fait, on va dire que les personnes qui sont, comment dire, qui sont relativement protégées, tendent la main, ne serait ce que dans l’énergie qu’elles peuvent leur, qu’elles peuvent donner à ceux qui se sentent moins bien pour essayer de les relever un petit peu.

Jean-Philippe Ackermann :

Ouais, mais je pense que c’est plus que, si tu veux il y a, il faut relativiser les drames, quoi. Moi, j’ai perdu le 16 mars 100% de mon chiffre d’affaires. Mais j’ai aussi une famille à, j’ai aussi des charges et aussi tout ça, etc. J’aurais pu m’effondrer, j’aurais pu être dans la déprime et c’est comme ça qu’on s’est redressé avec des amis, qu’on a créé Millésime.Best, qu’on a travaillé, qu’on s’est réinventé, qu’aujourd’hui les affaires repartent. Moi, depuis le 16 mars, je me suis donné 0 en revenus, donc je vis sur des réserves. Et je vois bien que mes réserves, elles sont de plus en plus difficiles. Je suis touché comme tout le monde. Mais honnêtement, par rapport à quelqu’un qui est malade, c’est rien quoi. C’est rien du tout. Et donc c’est là que je dois agir. C’est là que je dois faire des choses. C’est là que je dois réinventer ma façon de travailler et c’est là que je dois donner du mental, du courage à tous les autres. C’est ça, notre job. Moi, je suis horrifié de voir sur les réseaux sociaux des gens que je connais, qui ont aucun problème, ni de salaire, ni de revenu, ni de maladie qui sont d’un négativisme extraordinaire. Stop, stop, stop ! C’est pas comme ça qu’on va redresser notre pays.

Marie Bodiguian :

Absolument, mais tu sais que notre cerveau va toujours enfin c’est la survie en fait. Il a tendance à d’abord aller vers les pensées négatives.

Jean-Philippe Ackermann :

Ah oui, c’est un effort, c’est un effort. Switcher.

Marie Bodiguian :

Voilà, c’est ce que tu disais.

Jean-Philippe Ackermann :

C’est un effort, mais il faut le faire, faut le faire.

Marie Bodiguian :

Ecoute Jean-Philippe. Merci infiniment pour ce moment et cette interview, tu nous a apporté beaucoup et j’espère qu’il y a beaucoup de chefs d’entreprise, d’entrepreneurs qui vont vraiment avoir pris des notes et mettre en application ce que tu, ce que tu nous a donné. Donc, est-ce que tu aurais des choses à rajouter ou ?

Jean-Philippe Ackermann :

Et bien je voudrais dire pour les chefs d’entreprise, je voudrais leur donner quelques clés pour repartir maintenant. La première clé, si tu me permets Marie.

Marie Bodiguian :

Ah mais bien sûr.

Jean-Philippe Ackermann :

La première clé, c’est de travailler sur : leur pourquoi personnel. C’est pourquoi je suis chef d’entreprise ? Pourquoi je fais ce métier ? Est-ce que je le fais uniquement pour payer des charges ? Est-ce que je le fais uniquement pour avoir un revenu ? Ou est-ce que je le fais parce que c’est une passion ? Est-ce que je le fais parce que c’est une mission ? Et là, il y aura deux, deux solutions. Soit je continue, soit j’arrête. Et il ne faut pas avoir peur de dire j’arrête. Moi, j’ai arrêté des entreprises parce que à un moment donné je n’étais plus en phase avec l’entreprise. 1 : travailler son pourquoi, c’est le moment de le faire, c’est le moment de le faire. Le deuxième point à travailler, c’est de travailler le cadre de référence de son entreprise, c’est à dire : le pourquoi de son entreprise. Sa mission, sa vision, ses finalités, ses valeurs et de le faire avec ses collaborateurs. Je suis en train de le faire avec beaucoup de co-dir ici, auprès de mes clients, et ça donne confiance aux collaborateurs, lesquels donne confiance à leurs clients et ça permet de maintenir le chiffre et même de redresser le chiffre. Et puis, le troisième conseil que je peux donner, c’est que messieurs, mesdames, chefs d’entreprise, vous n’êtes pas seuls. Il y a vos collaborateurs qui sont là, travailler en équipe, travailler avec eux. Ils vont vous donner des solutions inimaginables. Moi, je me souviens quand, à 27 ans, j’ai repris l’entreprise de 75 salariés qui était, qui était malade. Je n’avais aucune compétence managériale, mais je me suis appuyé sur les 75 salariés. Et en un an, on a redressé la société.

Marie Bodiguian :

Bravo !

Jean-Philippe Ackermann :

Voilà les trois conseils : c’est vos collaborateurs sont vraiment vos soutiens. Travailler à la mission d’entreprise et puis travailler votre propre mission et vous allez ressortir beaucoup plus fort.

Marie Bodiguian :

Merci beaucoup, Jean-Philippe. Est-ce que si tu avais en fait une question à poser à ceux qui nous regardent et ceux qui nous écoutent, quelle serait elle ? Pour qu’ils, justement, ils se mettent en action ?

Jean-Philippe Ackermann :

Pour quoi vous vivez ?

Marie Bodiguian :

Très puissant, très puissant. OK, et bien Jean-Philippe. Merci infiniment pour ce moment, cette interview. On se retrouve sur millésime best, Millésime.Best. On se retrouve dans, je pense, l’interactivité que tu donnes avec ton livre. Donc, « Aussi fine soit la tranche, elle a toujours de faces ». Voilà et puis, parmi l’ensemble de tes conférences où tu es joignable sur LinkedIn.

Jean-Philippe Ackermann :

Exact.

Marie Bodiguian :

Voilà. OK. Et bien Jean-Philippe, je te remercie.

Jean-Philippe Ackermann :

C’est moi qui te remercie, Marie. C’était très agréable.

Marie Bodiguian :

Et bien écoute je te remercie et puis, d’un coup, peut être que cette interview aura une suite, on sait jamais. Et à très bientôt, merci beaucoup.

1 Comment

  1. Interview – Comment parler en public avec bonheur, et détachement ? – Marie Bodiguian

Write a Reply or Comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.